Le microbiote intestinal préoccupe l’esprit de plusieurs professionnels de santé et de chercheurs scientifiques. Aujourd’hui, plus que jamais, la flore intestinale est au cœur de tous les débats car on se rend compte de l’impact du microbiote sur la santé de l’individu.
Cette partie portera essentiellement sur le transfert du microbiote pendant la grossesse. Dans un premier temps, j'expliquerai le choix de ma thématique et dans un second temps, je détaillerai ce qu’est le microbiote, comment ils se nourrissent. Ensuite nous nous pencherons sur l'impact, à long terme, que peut avoir un bon microbiote lors de son transfert de la mère vers le fœtus. Et pour clore cette partie, je vous proposerai un menu pour l’entretien de notre flore intestinale.
I. Le choix de la thématique :
Durant ma grossesse, et ce avant même de commencer le BTS diététique, mon intérêt s'est porté sur le microbiote. Et c'était donc pour moi l'occasion de changer mon alimentation en éliminant tous les produits raffinés et en veillant à utiliser un maximum d'aliments naturels.
J’ai tout d'abord arrêté de prendre les antibiotiques car d’après une étude, ils engendrent une dysabiose de la flore intestinale. Ensuite je cuisinais des plats riches en fibres, en graines oléagineuses, en fruits secs.
Mes premiers constats se sont vite fait sentir : j’étais moins fatiguée, je tombais rarement malade et je n’avais pas pris de poids.
Étant donné que l’alimentation joue un rôle majeur sur la qualité de notre microbiote, j’étais déterminée à mener mon étude personnelle autour de ce sujet. Y a-t-il une relation entre le fait d'être en bonne santé et la qualité de notre microbiote intestinal ? Y a-t-il un lien entre le microbiote de la maman et celui du fœtus ? Et y a-t-il un transfert de la flore intestinale via le cordon ombilical ?
II. Le microbiote et les prébiotiques ?
1. Définition du microbiote
Le microbiote ou anciennement appelé « la flore intestinale » désigne les différentes populations de bactéries, virus, parasites et champignons présents naturellement dans l’intestin et plus précisément dans le colon. Ce dernier en tire son nom puisqu'il est colonisé par des bactéries non pathogènes.
À l’âge adulte, nous hébergeons dans le tube digestif près de 160 espèces différentes pour un total de près de 100 000 milliards, soit dix fois plus de cellules que contient l’organisme humain. Il faut rappeler que le microbiote est propre à chaque individu. Nous naissons avec un microbiote initial qui continue à se développer au fil des années.
2. Rôle des microbiotes
Des millions de bactéries vivent dans notre intestin sans engendrer de pathologie. Elles sont même essentielles au bon fonctionnement de notre organisme. Cet écosystème d’environ deux kilogrammes permet, via la production d’une multitude de substances bénéfiques à l’organisme, d’assurer le maintien de l’équilibre de nombreuses fonctions biologiques impliquées dans la santé de l’hôte. En cas d’une dysbiose, le corps peut présenter des pathologies.
Les rôles du microbiote intestinal sont nombreux, nous pouvons en citer quelques-uns :
- Ils permettent le développement de la muqueuse intestinale ; synthétisent des vitamines (vitamine du groupe B, B12, K) ;
- Dégradent certains composés comme les protéines, fibres, glucides non digérés par les enzymes digestives ;
- Protègent l’organisme contre les bactéries potentiellement pathogènes provenant de l’alimentation ;
- Et enfin ils affectent la façon de stocker les graisses et équilibrent les niveaux de glucose dans le sang.
3. Le contrôle du système immunitaire
Le microbiote intestinal et le système immunitaire semblent entretenir une relation singulière.
Un rapport intéressant a démontré que la consommation d’un produit à base de lait fermenté riche en probiotiques entraînait des altérations de l’activité cérébrale en réponse à des stimulus émotionnels visuels mesurés par imagerie et résonance magnétique fonctionnelle, en comparaison à la consommation d’un produit témoin.
Le microbiote est en effet en communication constante avec la partie du système immunitaire située dans l’intestin. Leurs « conversations » aident l’organisme à distinguer les entités allochtones inoffensives.
4. Les prébiotiques (les fibres alimentaires)
Ce sont des nutriments réservés aux microbiotes (probiotiques) qui régulent le système digestif en proliférant la flore intestinale. Ces substances se trouvent dans certains types de glucides (les fibres alimentaires) que les humains ne peuvent digérer. Ce sont des glucides non assimilables par l’organisme comme la cellulose, les galacto-oligosaccharides et surtout l’inuline. Ils sont fermentables et résistants lors de leurs passages dans l’estomac et l’intestin grêle, avant d’arriver dans le côlon.
En ayant une flore intestinale équilibrée à l’aide des prébiotiques, nous prévenons le syndrome de l’intestin perméable.
Grâce à eux, nous pouvons améliorer l’absorption de calcium (augmentation de la densité osseuse), diminuer le taux de triglycérides (prévention des maladies cardio-vasculaires) et le taux de l’index glycémique des aliments (prévenir le diabète) mais aussi réduire le risque du cancer du côlon, traiter la constipation et diminuer l’appétit (traiter l’obésité puisqu'une flore intestinale efficace augmente le sentiment de satiété).
Nous en déduisons donc qu'une alimentation riche en fibres alimentaires joue un rôle important dans la construction d'une bonne flore intestinale. Il en va donc de dire que l’être humain peut déterminer la qualité de son propre microbiote par l’alimentation ainsi que les composantes génétiques et environnementales.
5. La santé du microbiote maternel :
Lors d'une étude longitudinale du microbiote vaginal au cours d’une grossesse normale, les scientifiques ont relevé une différence dans la composition et la stabilité de la communauté microbienne entre les femmes enceintes et les femmes non enceintes. D’après Ruth Ley, microbiologiste à la Corneil University d’Ithaca (New York) qui a suivi le microbiote intestinal pendant la grossesse, la diversité des bactéries intestinales diminue au fil des mois de grossesse pour laisser place à certains types comme le protéobactéries et les actinobactéries. Ces derniers aident à combattre les micro-organismes pathogènes afin de ne pas affecter le fœtus.
Pour aider la mère à avoir un bon microbiote, son alimentation doit se composer d'aliments naturels et de préférence biologiques. Il faut veiller à privilégier les produits de saison car riche en vitamines et en minéraux. Une alimentation riche en prébiotiques (en inuline comme les oignons, l’ail, les échalotes et les poireaux), sera très bénéfique pour la construction d’une bonne flore intestinale. Ainsi que la consommation d'aliments riches naturellement en probiotiques comme les yaourts, le kéfir (boisson issue de la fermentation du lait), la choucroute, le tempeh (produit à base de soja fermenté), le kimchi (accompagnement coréen fermenté et épicé), le miso (fermentation du soja avec du sel et le champignon koji). Sans oublier une bonne hydratation afin de les évacuer.
D’après une étude de 2014 publiée dans Food Chemistry, il est vivement conseillé de commencer sa journée par une pomme verte afin de stimuler les bonnes bactéries. Cependant, il faut être vigilant par rapport à la salmonelle en désinfectant et en nettoyant les végétaux avant la consommation.
III. Le transfert du microbiote de la mère vers le fœtus
Les chercheurs ont effectué des analyses sur les membranes materno-foetales des nouveau-nés en bonne santé. Ils ont déterminé la présence de bactéries utiles à l’organisme. La plus grande colonisation est présente dans le liquide amniotique avalé par le fœtus et dont la teneur bactérienne dépend du microbiote intestinal de la mère. Une autre étude démontre que des souris enceintes recevant de l'Enterococcus faecium ont transféré un taux de cette souche au liquide amniotique et à l’intestin fœtal.
Nous en déduisons donc qu’il y a bien un transfert de microbiote entre la mère et le fœtus. Mais les mécanismes par lesquels les bactéries intestinales ont accès à l’environnement utérin ne sont pas encore compris. Est-ce via le sang ? Cette question m'avait longuement tourmenté puisque la barrière épithéliale intestinale empêche généralement les bactéries d’entrer dans le système circulatoire.
Maintenant que le transfert du microbiote de la mère vers le foetus est confirmé, il faut réfléchir à comment avoir une flore intestinale équilibrée pour construire celle du fœtus.
Une étude en 2014 publiée dans la revue « The Proceedings of the Nutrition Society » a révélé que les légumes, les céréales et les haricots nourrissaient un environnement intestinal positif. Les fibres sont le point commun entre ces aliments.
Selon l’ANSES* les repères en fibres pour les femmes enceintes sont identiques à ceux de la population générale adulte (ANSES 2016a). Ils sont fixés à 30g/j.
Les fibres limiteraient les effets de la constipation, exacerbée pendant la grossesse. Leurs rôles sont de nourrir la flore intestinale et favoriser une constitution du sucre lent qui se relâche progressivement dans l’organisme. Les groupes d’aliments riches en fibres sont les fruits et légumes, légumineuses, céréales complètes, noix, graines. Les fibres entretiennent équitablement les diverses souches bactériennes de la flore intestinale qui auront un pouvoir notamment sur les micro-organismes pathogènes.
Quand nous avons des probiotiques bien nourris, ces derniers vont pouvoir produire des vitamines et des acides gras à courtes chaînes (acide butyrique) qui sembleraient moduler les paramètres métaboliques, tels que le poids des mères et des nouveau-nés (2). Ils permettent de sécréter aussi du propionate, une substance qui permet à notre intestin de communiquer avec le cerveau ainsi que les hormones qui régulent l’humeur (sérotonine ou la dopamine) sollicité par l’intestin. Une alimentation ne comprenant pas ou peu de fibres alimentaires ne maintient pas une flore intestinale équilibrée.
IV. Cas d’une mère obèse
La recrudescence du nombre de nourrissons de plus de 5 kilos (macrosomie fœtale) nous laisse-t-elle indifférents pour savoir le pourquoi et le comment des choses ? Y a-t-il un élément qui a disparu ou qui a apparu dans l’alimentation ?
Une étude portante sur des souris axénique (sans microbiote, isolées in utéro puis élevées et nourries de façon stérile) et des souris conventionnelles mais obèses, a démontré que le transfert de microbiote intestinal de souris obèses vers des souris normo-pondérées avait permis d’observer une prise de poids significative des souris non obèses.
Une autre étude en lien avec la qualité des macronutriments tels que les lipides a démontré qu’une alimentation riche en acides gras saturés et en oméga 6 altère l’équilibre du microbiote intestinal et développe une microflore intestinale obésogène.
Quant à l’oméga 3 parental, il semble modifier favorablement le microbiote des nourrissons, via un effet anti-inflammatoire.
Suite à un sondage réalisé sur des réseaux sociaux portant sur le nombre de femmes obèses qui ont accouché des bébés en surpoids, 972 participantes en surpoids, 563 d’entre elles ont donné naissance à un bébé dépassant 4 kilos. Il y a donc une probabilité de 58% d’avoir un nouveau-né en surpoids.
Étant donné que la mère transfert un pourcentage de microbiote à son fœtus, donc une mère obèse pourra avoir un bébé en surpoids d’après les expériences citées précédemment.
Les données épidémiologiques indiquent également que l’interruption des échanges microbiens par l’utilisation d’antibiotiques pendant la grossesse pourrait augmenter le risque d’obésité juvénile. Une autre étude a montré que le risque d’obésité était 84% plus élevés chez les enfants exposés aux antibiotiques prénatals au deuxième ou au troisième trimestre que chez les enfants non exposés. Donc suite à ces résultats, nous en déduisons que l’état de santé du microbiote maternel influence celui du fœtus.
V. Rencontre avec M.Manetta, l’auteur du livre « Micronutrition et Nutrithérapie de l’intestin »
Je me suis entretenue avec M.Manetta, l’auteur du livre « Micronutrition et nutrithérapie de l’intestin » afin de lui poser quelques questions concernant le microbiote intestinale.
Pourquoi le choix du microbiote ?
"Dans mon travail de recherche, beaucoup de points « non élucidés » paraissaient avoir un lien avec le microbiote intestinal. J’ai donc voulu en savoir plus pour comprendre"
Qu’est ce qui vous a passionné le plus pendant vos recherches sur le microbiote ?
"Mieux comprendre l’origine (et la gestion) de inflammation biologique et de nos défenses immunitaires".
Est-ce que vous faites attention à ce que vous mangez dans votre vie quotidienne afin d’avoir un bon microbiote ?
"Ayant à la base une assez bonne alimentation riche en fruits et légumes crus, je n’ai pas eu à faire beaucoup d’efforts. Je consomme à l’occasion des yaourts enrichis en probiotiques que je réalise moi-même".
Citez-nous quelques aliments naturels qui aident à évoluer notre flore intestinale ?
"Ail, oignon, artichauts, asperges, fromages au lait cru".
Est-ce que le transfert d’un bon microbiote de la mère vers le fœtus a un effet positif ou négatif sur la santé de ce dernier plus tard ?
"Sans aucun doute !! Il faut donc aider les femmes enceintes à avoir un « bon » microbiote intestinal pour transférer les « bonnes » souches bactériennes à leur futur enfant".
Pouvez-vous partager avec nous, un menu d’une journée riche en fibres ?
Voici un menu issu de mon livre« Micronutrition et Nutrithérapie de l’intestin » :
Petit-déjeuner
Muesli maison (Flocons de riz, d’orge, de sarrasin, d’avoines, avec graines de sésame, noix de pécan, voire des fruits séchés bio et une cuillère à soupe de purée de noisettes), à mélanger avec du lait d’amande nature bio, 1 poire avec la peau (bio), thé vert bio.
Déjeuner
Salade verte (roquette, pissenlit, feuille de chêne) avec noix et parmesan (assaisonnement mélange d’huiles bio colza, un peu de lin, citron), omelette aux asperges sauvages ou bio si la saison (mars – avril – mai) ne correspond pas (Cuire légèrement les plus grosses à la poêle). Petite assiette de quinoa avec ail frais, oignon, gingembre et huile de colza non chauffée
Abricot ou fruit de saison bio.
Dîner
Petit ramequin de lentilles bio au curry avec noisette de beurre bio
Épinards frais bio cuits liés à la crème de soja bio avec un morceau de fromage de chèvre fondu, 2 kiwis et enfin une infusion de verveine bio.
VIII. Conclusion
J’ai pu apprendre au fil de mes lectures pourquoi la majorité des microbiologistes, gastro-entérologues et autres neurobiologistes s’accordent aujourd’hui pour affirmer que l’intestin et ses résidents bactériens sont bien plus qu’un simple conduit. Comme vu dans les rôles du microbiote, ce dernier joue un rôle vital pour l’organisme. Sans lui, le corps est en déséquilibre. Et puisque nous avons confirmé qu’il y a bien un transfert entre le microbiote maternel et fœtal, cela veut dire que si la maman transfert un bon microbiote à son enfant, elle lui offrait une protection qui restera avec lui toute sa vie.
Je recommande donc à toutes les femmes enceintes d’être suivies par une diététicienne afin d’introduire des aliments qui sont riches en probiotiques naturellement cités dans le paragraphe.
La santé du microbiote maternel permet de construire une bonne flore intestinale pour elle ainsi que pour le futur nouveau né. Et selon les mots sages de David Perlmutter, MD « Un microbiote en bonne santé se traduit par un être humain en bonne santé ».
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